7ème édition de la semaine de nos métiers administratifs. A la lecture de l’alléchant programme une question m’a traversé l’esprit d’où le titre de ce billet.
Mon idée était déjà forgée : c’est un métier. Après avoir côtoyé, écouté fréquemment notre cher François Granier, sociologue chercheur-associé LISE, CNAM-CNRS, dirigeant de l’observatoire de la FFMAS et lu son excellent ouvrage, «Du clavier au Cloud, quels avenirs pour les secrétaires, assistantes et assistants ? » [en savoir +] paru en 2018 aux Editions Raison & Passions, mon opinion était renforcée.
Clavier sous mes doigts pour rédiger un billet relatif à cette semaine des métiers le doute s’est insidieusement insinué dans mon esprit : et si c’était une profession ou les deux !
J’accepte aisément ma grande ignorance et ma totale incompétence quant à l’ébénisterie, à l’agriculture, à la médecine, à… en revanche je déteste ne pas savoir lorsqu’il s’agit de tout ce qui touche de près ou de loin aux fonctions administratives alors… je m’empresse d’apprendre.
Me voila donc partie farfouiller sur le net. J’y suis restée une durée infinie et vais être franche avec vous : je m’y suis noyée ! Les articles, réflexions, commentaires, savoirs, études… d’Everett Hughes, Michèle Descolonges, Geneviève Latreille, Claude Dubar,… sociologues, tous plus brillants les uns que les autres, ont brouillé mon esprit. Plus j’avançais dans mes recherches et moins je savais. Le tourbillon des mots savants, dosés subtilement dans des phrases alambiquées, engluait ma pensée et annihilait ma réflexion.
Subitement m’est revenue en mémoire cette citation d’Alfred Sauvy (1898 – 1990 – économiste, démographe et sociologue) «La plupart de ceux qui écrivent dans leur matière, le font pour eux au lieu de le faire pour les autres. Quel progrès si une pleine communication s’établissait avec les lecteurs et si ceux-ci pouvaient, grâce à l’effort du rédacteur, saisir rapidement ce qu’il a voulu dire !». C’est là que j’ai remercié François Granier pour sa clarté d’expression et sa faculté de se mettre à mon niveau de non-sociologue !
Certes vous pouvez penser que j’égratigne – gentiment – les représentants de la sociologie mais ils ne sont pas les seuls. Reconnaissez franchement que certains spécialistes juridiques, économiques, politiques, médicaux, informatiques…, qualifiés d’experts hyper pointus dans leurs domaines respectifs, mettent un point d’honneur – voire un malin plaisir frisant le sadisme (pour sadisme je reconnais bien volontiers que j’exagère… Quoique !) – à utiliser un langage ésotérique seul compréhensible par eux et par les initiés. Je suis bouche bée, ahurie et désemparée devant leurs écrits et/ou leurs discours et n’ai plus qu’à me diriger vers ma trousse pharmaceutique pour faire descendre la pression infligée à mon pauvre cerveau ! Les deux aspirines et la vessie de glace sur mon crâne ne suffisent pas toujours, une bonne nuit de sommeil non plus d’ailleurs !
La seule chronique, véritablement accessible à ma compréhension, vient de Raymond Boudon (1934 – 2013), philosophe et sociologue français à la notoriété internationale, relevée par Agnès Cavet sur le site fr.hypotheses.org.
«Lors de sa première conférence des journées d’étude Formation de formateurs, organisées en septembre 2007 par la Mission Formation de l’INRP il a proposé un retour sémantique et étymologique sur les termes de «métier» et de «profession».
Aux racines du vocabulaire
Si aujourd’hui les termes «métier» et «profession» sont parfois employés comme synonymes, leur étymologie et l’évolution de leurs significations mettent en lumière des différences structurantes, dont la prise en compte reste éclairante pour aborder les questions de formation. Ces différences se situent à deux niveaux principaux : le type de savoirs en jeu et le mode d’acquisition de ces savoirs.
Métier
Travail manuel, technique ou mécanique qui repose sur un ensemble de savoirs incorporés ; habileté qui s’acquiert par l’expérience ou le training (entraînement, répétition, voire routine…).
Profession
Activité qui fait appel à des savoirs savants. En particulier, pour les professions de l’humain (médecine, enseignement…), l’exercice requiert un savoir de plus haut niveau et une capacité d’abstraction, nécessaires pour retrouver le général, le principe, derrière le particulier de chaque individu (patient, élève…).
Activité qui se «professe», c’est-à-dire qui s’enseigne par la voie de l’explicitation orale des savoirs et des pratiques, ce qui implique une rationalisation discursive de l’action. Cette rationalisation s’opère par le passage à l’écrit, lequel permet à la fois la capitalisation des savoirs et leur plus large diffusion.
On peut remarquer qu’il n’existe pas de forme adjectivale du mot métier (comme existe l’adjectif «professionnel»).
C’est autour de la transmission de savoirs «professionnels» que se sont organisées les premières universités, aux XIème et XIIème siècles (Bologne, Montpellier, Salerne…).
Dans les pays anglo-saxons, le passage par une formation universitaire reste un critère déterminant pour l’accès à une «profession», et un marqueur de prestige reste attaché aux «professions», qui se distinguent encore nettement des métiers.».
Le sens des mots a évolué et la différence initiale est aujourd’hui moins aisée. J’en suis donc arrivée à la conclusion, en ce mois d’octobre 2020, de parler métier ET profession. Serez-vous d’accord ? C’est discutable et je suis prête à revoir ma copie. Aussi, en attendant le large débat qui va nous occuper les cinquante prochaines années pour parvenir à un accord définitif dénué de toute ambiguïté, une citation peut nous guider :
«Le management est le plus vieux des métiers et la plus récente des professions.»
Abbott Lawrence Lowell
Tout est dit !
Josette Dubost
Membre fondateur – Expert métier FFMAS