En ce mercredi 20 avril au soir nous étions environ 15,6 millions devant nos postes de télévision à regarder le débat de l’entre-deux tours de l’élection présidentielle. Je me garderai bien d’émettre un commentaire sur les deux protagonistes en revanche j’ai été abasourdie par les remarques préliminaires des représentants de leurs partis respectifs.
Interviewés, tous ont répondu que Marine Le Pen et Emmanuel Macron étaient calmes, détendus et sereins d’où le titre de ce billet. Quand je doute (et c’est le cas !) ou ne sais pas je questionne : s’il vous plaît, madame, monsieur, pourriez-vous nous expliquer comment vous arrivez à cet état de sérénité lors d’un enjeu aussi crucial ?
Je n’entrerai pas dans le détail de ma vie privée où madame sérénité m’a quittée et resterai sur le champ professionnel. En effet j’ai été amenée, à de nombreuses reprises, à vivre des instants déterminants pour l’avenir de ma carrière. Par exemple j’ai en mémoire la présentation d’un énorme et délicat projet de formation devant un jury composé de 11 personnes (vous avez bien lu 11 personnes !) qui m’ont bombardée de questions. Quand je suis entrée dans la salle mes mains tremblaient, ma gorge était nouée et j’étais au bord de l’évanouissement. Je me suis assise en triturant frénétiquement ma bague fétiche. Une heure de présentation solitaire et deux heures sur le grill à supporter des regards douteux, des moues dubitatives, des controverses «Vous êtes certaine de ce que vous dites ?», «C’est étonnant votre manière d’aborder ce sujet ! Elle sort du cadre de notre institution !»…
Je savais, en m’y rendant, que j’allais vivre des instants détestables, que j’allais être malmenée, passée au crible, que j’allais être sous le tir nourri d’un incessant questionnement. Mes réponses allaient être décortiquées. Le moindre mot sortant de ma bouche allait être examiné à la loupe. Chacun de mes gestes allait être disséqué. Mon paralangage allait faire l’objet d’une rigoureuse analyse. Je m’y étais préparée, scrupuleusement, intensément, laborieusement.
Se préparer même activement est une chose. Le vivre en est une autre et j’affirme que je n’étais pas du tout sereine pas plus que calme et détendue ! Mais alors pas du tout du tout ! En comparaison avec mon état, flasque était la corde tendue sur l’arc !
Tout cela m’amène une fois encore à m’interroger. Serais-je la seule à ne pas garder ma sérénité quand l’enjeu est colossal ? Serais-je un être à part ? Si tel est le cas il faut me mettre sous cloche et m’étudier attentivement. Je plaisante bien entendu car je sais que nous sommes nombreuses et nombreux à perdre notre sérénité dans des cas extrêmes.
Alors… qu’est-ce donc que la sérénité qui nous fait tant défaut dans des moments essentiels ?
Tournons-nous vers Larousse : sérénité = apaisement, ataraxie, calme, douceur, équilibre, impassibilité, imperturbabilité, paix, philosophie, placidité, sang-froid, self-control, tranquillité. – Littéraire : quiétude, repos.
Selon Ooreka «la sérénité est un état d’apaisement et de calme qui reflète une paix intérieure. Les pensées sont maîtrisées. L’équilibre est atteint entre le corps et l’esprit, entre les émotions positives et négatives. Cet état plus ou moins permanent se traduit par un bonheur, une plénitude et une satisfaction».
Facile à dire et à écrire ! Très compliqué, voire impossible, à appliquer !
Ma passion des citations m’amène à vous en fournir deux très éclairantes :
«Il n’y a pas de philosophe qui supporte avec sérénité une rage de dents».
William Shakespeare
«C’est pour la plupart des hommes un exemple décourageant que la sérénité d’un cochon».
Anatole France
Donc loin de moi l’idée de vous dire d’adopter telle ou telle posture pour atteindre la sérénité et de faire ceci ou cela. J’en suis totalement incapable et n’ai pas la compétence requise. Raison pour laquelle je prie humblement Madame Le Pen et Monsieur Macron de nous fournir leurs astuces. Soit leurs équipes respectives ont menti, soit ils ont été coachés par des experts en sérénité pour arriver à un tel niveau de contrôle ! Dans cette seconde hypothèse leurs précieux conseils nous enchanteraient et nous seraient bigrement utiles dans les moments décisifs !
Je vais simplement me contenter de vous envoyer une constellation de bulles de sérénité dans l’image et vous procurer mes deux petits trucs. Ils n’ont rien de magistraux mais ils me permettent de lâcher prise (juste un peu !), de surmonter mes doutes, de dompter mon trac et de désamorcer mon angoisse.
- Je fais appel à mon ancrage de ressource. Précédemment je vous disais que je triturais ma bague fétiche. Cette bague vient de ma grand-mère chérie, me porte chance et m’accompagne dans les moments délicats de ma vie. J’ai l’impression qu’elle me protège et que ma mémé est à mes côtés pour me soutenir et m’encourager mais… On peut ne pas y croire !
- Je fais part de ma fébrilité avant de commencer. Pourquoi fais-je cela ? Tout simplement parce que «Si cela va sans dire, cela ira encore mieux en le disant» ! comme l’a si bien exprimé Talleyrand. J’ai pris la parole devant les 11 jurés en commençant ainsi «Je suis impressionnée. J’espère être à la hauteur de vos attentes et exigences mais sachez que je ne suis pas à l’aise. J’ose même vous dire que j’ai peur car ce magnifique projet est capital pour moi».
Lorsque je suis entrée dans une salle de formation pour la première fois de ma vie j’étais tétanisée par la trouille. Je l’ai avouée à mes stagiaires. Résultats : cela fait plus de 40 ans que je suis formatrice et j’ai remporté ce très beau projet de formation qui a duré 5 ans.
Au fait, et à bien y réfléchir, je suis contente de ne pas patauger dans la sérénité à chaque minute de ma vie car selon la talentueuse et regrettée Anne Sylvestre
«Une femme qui atteint la sérénité est une femme qui a abandonné le combat».
Tout est dit !
Josette Dubost
Membre fondateur, expert métier FFMAS