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Le billet de Josette | Faire face à un jury

Se retrouver face à un jury, à 20 ou 45 ans, est redoutable voire angoissant. Pour certain(e)s, ce sont des souvenirs détestables. Pour d’autres, c’est une première et de multiples questions affluent.

Oral d’examen, concours d’accès à une école, soutenance de mémoire visant une certification, présentation d’une offre à un client, entretien de recrutement… les situations, où un jury est présent, jalonnent nos vies. Vos professeurs et vos formateurs vous préparent scrupuleusement à toutes les épreuves. Vous-même êtes sur la brèche H24 – vous ne dormez plus ! – pour affronter ce crucial moment et une inconnue pointe son méchant museau : quid du jury ?

Forte de toutes ces questions posées par mes stagiaires et mes nombreuses rencontres estudiantines quant au jury, j’ai décidé, pour ce billet de mars, d’aborder ce point essentiel parfois occulté. Je me suis largement inspirée de deux excellents ouvrages de mon ami Bernard Fripiat en photo : Trucs et astuces pour réussir vos examens et concours paru aux éditions d’Organisation et Comment réussir vos examens ? L’intelligence ne vous dispense pas d’être malin paru aux éditions Demos. Son accord à reproduire ses meilleures pages m’a beaucoup touchée. Je l’en remercie chaleureusement et lui exprime toute ma gratitude.

Que faire quand…

Le jury plaisante ?

Participer à un jury est une épreuve stressante et fatigante. À certains moments (11 h 30, 14 h…) le jury éprouve le besoin de décompresser. Vous pensez alors que les jurés n’attachent pas à votre passage l’importance que légitimement vous lui accordez.

Il est déconseillé de vous mettre à plaisanter aussi. Vous risqueriez de vous déconcentrer, de choquer un juré de mauvaise foi ou de risquer un trac paralysant. Cela dit, ce genre de réaction est très rare.

En revanche, beaucoup de personnes se montrent vexées par leur comportement : « Moi, je joue un moment important de ma vie et eux, ils blaguent ! ».

Cette réaction, tout à fait compréhensible, a pour effet de mettre le jury mal à l’aise. La réaction de ce dernier est souvent marquée par une frustration qui débouche sur un « Passons aux choses sérieuses » et les questions « qui tuent » fusent et peuvent devenir agressives d’autant plus que vous donnez l’impression de ne pas être détendu(e).

La réaction idéale est de sourire tout en restant concentré(e). Si une plaisanterie vous paraît ridicule, évitez de le montrer à son auteur, fût-ce avec les yeux.

Le jury se dissipe ?

Cela se produit parfois le matin vers 11 h 50 et souvent en fin d’après-midi.

L’horreur pour celui ou celle qui passe en dernier lieu. Les jurés ont vu 5 candidat(e)s, il n’en reste plus qu’un(e) : vous ! Dans leur tête, c’est déjà fini : « Comment est-ce que vous rentrez ?…. Oh, mais je peux vous raccompagner, j’habite tout près !… »

Attention, pour eux c’est peut-être « fini », mais pour vous cela commence. N’oubliez pas que vous êtes le point de mire. Attirez leur attention par des gestes appropriés, un ton passionné et un débit nerveux. Si votre nom termine l’alphabet, il est bon que vous vous entraîniez à ce comportement.

Sachez aussi qu’un jury est plus facilement « bluffé » à 16 h que dans la matinée

Le jury s’ennuie ?

Cela arrive lorsqu’un de ses membres a une idée fixe. Vous êtes la 5e personne à passer l’épreuve. Un juré vous demande « Au fait, quelles sont vos pistes essentielles pour organiser votre futur assistanat et bien gérer votre temps ? ». Vous voyez les autres jurés lever les yeux au ciel d’ennui. En effet, c’est la 4e fois que leur collègue, et néanmoins « ami(e) », interroge sur cette question. Il va sans dire que cette réaction ne fait que braquer davantage votre interlocuteur.

N’accompagnez pas les autres membres dans leur désapprobation par un : « Je suis bien d’accord avec vous, cela ne présente guère d’intérêt ! » (Il suffit parfois d’un regard ou de gonfler les joues pour donner cette impression à celui qui vous interroge, rendu d’autant plus « paranoïaque » que l’ambiance est tendue).

Même s’ils sont d’accord avec vous, les autres membres du jury ne pourront vous soutenir lors de la délibération. Comment voulez-vous qu’ils justifient votre désintérêt pour une partie de votre matière ?

Au contraire, voilà le moment idéal pour vous montrer passionné(e). Soyez l’allié(e) de la personne qui vous interroge. Les autres ne pourront pas vous le reprocher. Si, en plus, vous réussissez à les intéresser, vous vous attirerez la reconnaissance de celui ou celle qui vous a questionné(e) et vous sortirez sur un nuage.

Le jury a mal entendu ?

Il n’est pas toujours aisé pour un juré de maintenir un jour durant son attention. À certains moments, il décroche…

Ce genre de choses se produit aussi lorsque nous lisons un livre. Notre esprit vaque ailleurs et nous sommes parfois obligés de revenir 3 pages en arrière pour revoir ce que nous venons de lire.

Il arrive parfois qu’un examinateur ayant été complètement distrait mette la note 12 (la seule qui ne nécessite aucune justification).

Si quelqu’un vous tient le discours suivant : «Je n’ai jamais compris comment j’ai pu réussir cet oral, car j’ai le sentiment d’avoir dit n’importe quoi, tout ce qui me passait par la tête. Je croyais qu’ils allaient me démolir mais j’ai simplement entendu : «C’est bon, vous pouvez y aller !».

Vous pourrez lui expliquer ce qui s’est passé.

Si, faisant fi de son amour-propre, un examinateur vous demande quelque chose que vous venez de dire, répétez calmement votre propos.

Dans certains cas, un juré peut faire mine de reprendre vos paroles en disant exactement l’inverse de ce que vous venez de répondre.

« Donc, si je vous ai bien compris… ». Ce genre de réaction a trois causes possibles :

  • soit le juré a réellement mal entendu,
  • soit il teste votre confiance en vous,
  • soit il teste votre diplomatie.

Dans les trois cas, il est préférable de vous donner tous les torts. Évitez absolument la phrase : « Vous m’avez mal compris(e) ! ». Le jury se sent agressé. Dites modestement, même si ce n’est pas vrai, « Je vous prie de m’excuser, j’ai dû mal m’exprimer. Ce que je veux dire, c’est… ». Et vous répétez ce que vous venez de dire. Ne laissez aucun espace-temps entre « m’exprimer » et « ce que je veux » afin qu’on ne puisse pas vous interrompre.

Il se peut qu’au sein du jury, une personne vous interroge sur quelque chose dont vous avez déjà parlé et qu’elle n’a pas entendue. N’attendez pas des autres une réaction du style « Eh coco, tu dormais ! ». Un jury ne se désavoue jamais devant un candidat. Répondez à l’interrogateur comme si de rien n’était, votre réponse se doit d’être complète et non un résumé (ce juré en tiendra compte pour sa note).

En général, les autres membres du jury vous sauront gré d’avoir surmonté cette difficulté avec tact.

Si l’un d’eux vous fait remarquer que vous avez déjà abordé ce sujet, répondez calmement «Je réponds à Madame qui me demande si…».

Le jury vous agresse ?

Dites-vous qu’il ne vous agresse pas, mais qu’il teste votre capacité de réaction à l’agression.

Un professeur d’étymologie se moquait et agressait systématiquement des candidats à la fonction de professeur de français lors de l’examen. Il était sans pitié pour ceux qui craquaient. Il justifiait son comportement par le fait que les futurs professeurs se retrouveraient un jour à enseigner la grammaire de base devant des élèves chahuteurs ou violents. Dès lors, la capacité de ces pédagogues à réagir à l’adversité était une qualité vingt fois plus utile que de connaître l’étymologie du mot « chaise ».

Dans certaines branches, et le secrétariat/assistanat en est un vivant exemple, il n’est pas rare que l’on agresse les candidat(e)s partant du principe que les postes qu’ils(elles) occupent ou ceux auxquels ils(elles) peuvent prétendre en réussissant cette épreuve, réclament beaucoup de flegme et de patience.

À noter que vous pouvez être averti(e) de l’existence de ce genre de comportement en étant présent(e) longtemps avant de passer. Cela écrit un jury peut modifier son comportement à tout instant !

  • Un juré vous pose une question personnelle dérangeante très déplacée ?

« Pensez-vous franchement que votre tenue vestimentaire actuelle soit à la hauteur de votre future fonction d’assistant(e) ? ».

Cette insultante question a été posée. Le jury, dont je faisais partie, est resté muet et stoïque (Souvenez-vous : un jury ne se désavoue jamais). La candidate est sortie de ses gongs « Je ne vous permets pas ! » et est partie en vrille. L’effet fut dévastateur pour tout le monde et sa soutenance un échec.

 « Je suis désolée que ma tenue vestimentaire ne soit pas à la hauteur de vos légitimes exigences et je vous remercie de me le signaler. J’en prends bonne note. » aurait été une réponse appropriée et la candidate aurait maîtrisé sa forte émotion.

Certains jurés n’hésitent pas à « harceler » les candidat(e)s. C’est une pratique de déstabilisation bien connue aussi ne tombez pas de ce piège et, surtout, ne pleurez pas !

Pour la petite histoire et à la suite d’un ferme recadrage entre nous ce juré ne s’est plus jamais avisé de poser cette injurieuse question !

Un seul juré cherche manifestement à vous déstabiliser ?

Par 3 fois un juré vous a dit « Vous êtes certain(e) de ce que vous dites ? C’est étonnant ! ». Il n’ajoute rien et ne fait aucun autre commentaire pendant toute la durée de votre narration. Ne tombez pas dans cette duperie. C’est une astuce pour voir si vous êtes capable de rester maître(sse) de la situation.

Ne l’agressez surtout pas par un propos désagréable ou une ignorance visuelle. Répondez simplement « Oui » et continuez calmement votre exposé en regardant, à tour de rôle, tous les membres du jury y compris lui.

Le jury vous félicite ?

Situation plus agréable que les cas précédents. Néanmoins, veillez à ne pas perdre l’avantage acquis. Si ça se passe à la fin de l’examen, restez réservé(e).

En cours d’épreuve, n’oubliez pas qu’elle n’est pas finie. Restez concentré(e) en attendant la question suivante, un trop grand relâchement risquerait de provoquer un trac paralysant pour le cas où celle-ci vous surprendrait.

Surtout, n’en rajoutez pas ! Le jury veut savoir si vous connaissez votre sujet. Une fois qu’il sait, il est content. Si on vous dit : « O.K. c’est très bien ! », arrêtez-vous, vous ne pouvez obtenir plus. Certes, il est humain que vous vous disiez : « Attendez, vous me dites très bien pour ce que je vous ai dit, mais que serait-ce si vous saviez que je sais ça et ça… ». Le « O.K. » signifie que le jury reconnaît que vous connaissez la réponse à la question qu’il vous a posée. Il a sa note en tête et n’a besoin d’aucune autre information.

Apprenez aussi à avoir confiance en vous. On a déjà vu un candidat s’effondrer parce que l’examinateur ne posait aucune sous-question. Il interprétait ce silence comme un signe d’insuffisance. Le professeur qui, en retard sur son horaire, était content de pouvoir mettre un 14/20 si rapidement, fut décontenancé par ce comportement qu’il interpréta comme un signe de faiblesse. Le candidat obtînt 9 !

Ce fait se produit presque toujours. Répondez, évidemment, à qui vous parle, mais n’oubliez pas les autres. Si vous omettez de regarder quelqu’un pendant une minute, il ne vous écoute plus. Entraînez-vous, chez vous, à regarder tout le monde quitte à utiliser quelques ustensiles simulant les jurés.

Celui ou celle qui farfouille dans ses affaires doit également avoir votre attention. Parlez-lui sans l’ignorer et ne vous laissez pas déconcentrer. Il s’agit d’une simple manœuvre de déstabilisation bien connue des jurés.

Un seul des membres du jury vous interroge. Les autres se taisent et vous scrutent « méchament » ?

Là encore c’est une méthode d’intimidation souvent pratiquée. Les jurés peuvent s’être mis d’accord au préalable sur cette approche juste pour « analyser votre réaction ».

Ignorez ces sourcils froncés, ces moues dubitatives, ces fronts plissés, ces bras croisés et ces postures en retrait. Ne vous laissez pas affaiblir par ces manœuvres intimidantes et regardez tour à tour chaque juré avec la même bienveillance et le même professionnalisme.

Commencez par le juré qui vous a questionné(e) et, si vous le pouvez, terminez par lui.

Un juré vous pose une question très large demandant une longue explication et vous savez que le temps est compté ?

Jouez la carte de la franchise. « Cette question, fort intéressante, demande un large développement. Si vous le permettez, je vais résumer ma réponse en X points. Premièrement… ».

Cette tactique vous fera gagner du temps et permettra de montrer au jury vos connaissances en la matière. De plus, les autres jurés vous seront reconnaissants d’avoir synthétisé.

Les jurés se disputent ?

Si la dispute concerne la note à mettre au candidat ou à la candidate qui vient de sortir, baissez les yeux et excluez-vous de la discussion. Ne bougez plus pendant le temps de la dispute. Pour la 3e fois : un jury ne se désavoue jamais ! Cela peut donc être une manœuvre pour vous fragiliser.

N’ayez pas la même réaction si le différend porte sur votre présentation. Il est évident qu’il faut être très prudent(e) face à une éventuelle prise de position, mais la crainte de manquer de diplomatie pousse beaucoup de candidat(e)s à se dire : « Ce ne sont pas mes oignons » et à se retirer complètement du débat.

Vous donnez ainsi l’impression que vous vous moquez d’une matière qui vous concerne et qui passionne deux êtres qui vont vous juger. Ils risquent d’ailleurs de se réconcilier sur votre dos « Et elle, elle s’en fout. Elle est bien au-dessus de nos petits problèmes ! ». Soyez très diplomate, mais montrez que le sujet du débat vous passionne. Le rêve étant de prouver que « finalement » les deux ont raison.

Un(e) secrétaire/assistant(e) habile sortira grandi(e) de ce genre de situation.

Vous avez dit une énormité ?

Tout le monde peut se tromper !

Présentez vos excuses et dites : « Sous le coup de l’émotion, je me suis trompé(e) et j’ai confondu. Permettez-moi de reprendre mon exposé ».

Respirez et reprenez calmement.

Vous perdez vos moyens et avez un trou de mémoire ?

N’hésitez pas à faire appel à l’indulgence et à la gentillesse du jury. « Pardonnez-moi mais j’ai un trou de mémoire. Pourriez-vous me mettre sur la piste SVP ? ».

Écoutez attentivement la réponse qui va vous être faite car elle vous permettra de rebondir rapidement. Pensez à remercier le jury.

Un juré vous dit n’avoir rien compris à vos explications à une question précise ?

Présentez vos plus vives excuses et dites : « Je n’ai pas été clair(e) dans mon explication. »

S’il n’a rien compris, vous en êtes totalement responsable. Reprenez votre exposé d’une autre manière en le regardant bien droit dans les yeux.

Vous ne connaissez pas la réponse à une question précise ?

Ne répondez jamais « Je ne sais pas » qui montre votre incapacité à vous débrouiller.

Éludez en tournant autour : « Cette question, très particulière, a été abordée succinctement pendant notre formation/notre cours. J’en ai retenu le principal à savoir… » et développez ce que vous pouvez.

Pour tout autre exposé (présentation d’une offre à un client par exemple) assurez-vous que vous avez préparé votre sujet minutieusement et que vous en maîtrisez parfaitement ses moindres détails.

Dans tous les cas ne manifestez aucune émotion particulière de panique ou d’affolement.

Le jury ne dit pas lorsque c’est fini ?

Souvenez-vous que vous vous êtes longuement entraîné(e) et que vous maîtrisez parfaitement le timing de votre présentation. N’hésitez pas à poser la question « J’ai terminé ma présentation. Souhaitez-vous que je développe un point en particulier ? ».

Cette petite phrase rappelle, gentiment, que le temps est achevé. Il est très rare que le jury vous réponde oui, car, pour lui aussi, le timing est archi serré.

C’est la raison pour laquelle vous devez occuper tout le temps imparti. Il y a toujours un juré qui a les yeux rivés sur sa montre et qui joue le rôle de gardien du temps.

Supposons qu’un juré vous réponde « Oui » sans autre commentaire, résumez votre pensée. « J’ai abordé 4 points pendant ma présentation, le premier portant sur…, le deuxième sur… Je crois avoir tout dit. »

Surtout pas « Je n’ai rien oublié » qui pourrait l’amener à réagir au terme « oublier ».

Si la réponse est « Oui je souhaite que vous développiez… », répondez en synthétisant au maximum car vous allez obligatoirement déborder sur le temps.

Pour conclure

Mon ultime conseil : si vous en avez la possibilité entraînez-vous fréquemment avec votre famille, des ami(e)s, des collègues… En effet « Pour atteindre l’objectif final je me concentre d’abord sur la préparation » préconise David Douillet et « La chance ne sourit qu’aux esprits bien préparés » recommande Louis Pasteur.

Inscrivez chaque situation sur 17 papiers et faites-les tirer au sort. 3 ou 4 personnes suffiront pour jouer tous les rôles. Comme un acteur maîtrisez votre texte à la perfection dans le timing imposé. Pour le reste inspirez-vous de Jean-Paul Belmondo « C’est tellement travaillé qu’on croit que c’est improvisé ».

Je vous souhaite bonne chance dans vos futurs oraux et termine ce billet par un trait humoristique pour vous détendre :

« Dans un examen des gens qui ne veulent pas savoir posent des questions à des gens qui ne peuvent pas répondre ».

Sir Walter Alexandre Raleigh

Tout est dit !

Josette Dubost
Membre fondateur, expert métier FFMAS